Abordant son expérience esthétique comme une recherche de formulation commune à tout élément du Vivant, Leïla Rose Willis réalise des œuvres qui traduisent des organismes et des rythmes plutôt que des représentations du monde. Les œuvres, allant du dessin à l’installation en passant par la photographie ou la vidéo, se complètent et se répondent en s’axant autour du thème principal de la Mer.
La Mer, l’Océan, et plus globalement l’eau, est perçue par l’artiste comme étant la conscience même de la planète. L’eau matérialise la circulation des idées, des savoirs, des échanges et multiplie les points de vue. L’eau sous toutes ses formes est l’élément central de sa relation au vivant, l’élément métabolique faisant résonner l’humain avec l’environnement, remettant l’humain à sa place d’être de la nature, au même titre que les minéraux, végétaux, animaux, bactéries et autres formes de vie. Ainsi, les oeuvres qu’elle fabrique invitent le spectateur à une promenade mentale, poétique, parfois critique, spirituelle ou abstraite, se déployant sur plusieurs strates de lecture. Elles l’incitent à relier plutôt qu’à cloisonner ce qui l’entoure, à ressentir les parallèles existants à des niveaux cellulaires ou cosmiques.
Les œuvres de Leïla Rose Willis naissent d’immersions dans le paysage doublées d’intuitions et de visions. Lorsqu’elle dessine, peint, plie, découpe, sculpte ou tresse, la sensation d’un lieu, ou le souvenir d’une résonance convoque un temps de fabrication méditatif. L’importance du geste pour ce qu’il est, du jeu de faire, révèle une dimension sacrée essentielle. Les formats en rapport direct avec la main se déploient à échelle humaine dans un jeu combinatoire induit par la série, tandis que les matériaux sont choisis pour leur fragilité, leur mutabilité, ou directement extraits de la nature dans une conscience écologique évidente et en lien avec l’Arte Povera qu’elle affectionne tout particulièrement.
Cette sensation d’être au grand tout s’accentue dans les performances de peinture ambidextre qu’elle propose sous le nom d’« Unfoldtranse » depuis l’automne 2024. Ce nouveau pan de sa pratique surgit alors comme l’essence sublimée de 20 années d’expérimentations plastiques et de recherches sur la conscience et ses états modifiés. L’encre de chine est toujours présente tandis que les sujets sont libérés au profit du voyage pictural symétrique proposé au spectateur sur une toile diaphane flottante. Le dispositif est minimal, les matériaux simples. La lumière est mise sur le geste et le dessin qui se crée dans le moment présent, en pleine conscience du souffle. L’immersion proposée aux spectateurs avec cette performance marque un tournant en pleine éclosion.